mercredi 12 mars 2014

Comment se débarrasser d'un pot de colle


Mercredi, 15h30. Je débarque à la station Frontenac. Je me sens fatiguée et irritable, et j’ai très certainement mon air bête habituel étampé dans le visage. Dans l’escalier roulant, une voix pète ma bulle.
Souris!
Je lève les yeux.
— Hmmmmmmmmm???
Deux marches plus haut, un gars dans la mi-trentaine, pas très francophone. Il répète :
— Souris!
— Euhhhh. Pourquoi?
— Si tu souris, tu te sens mieux.
   Ah bon. D’accord.
Je résume, parce qu’il a un accent épouvantable et je dois lui faire répéter chaque phrase au moins deux fois. Je m’imagine que l’échange va s’arrêter là et que je vais retrouver ma tranquillité habituelle.
Malheureusement, mon compagnon ne l’entend pas de cette façon.
Il sort un jeu de Wii (Just Dance) et un petit papier sur lequel est gribouillé un mot de bonne fête bourré de fautes. Il me demande s’il y a des fautes et il me tend un crayon. Vu que je suis gentille (des fois), je lui corrige son mot.
Comme nous arrivons à la sortie, je dis :
— Ok bonne soirée là!
Et je m’éloigne rapidement. À peine sortie de la station, qui c’est que je vois tu pas surgir à mes côtés?
Eh oui.
Ne comprenant toujours pas ce qu’il me veut, je commence à élaborer un stratagème pour me débarrasser de lui. Pendant ce temps, mon ami continue de déblatérer dans un langage incompréhensible que je ne me donne même pas la peine d’essayer de comprendre. Je me contente de ponctuer son discours par des ok et des ouais.
Après environ trente seconde de marche, mon salut se présente : l’épicerie IGA du métro Frontenac! Je n’ai pas besoin de faire l’épicerie. Mais ça, il n’est pas obligé de le savoir.
— Tu t’en vas où toi là comme ça? Que je lui demande
— Ontario, Pie-IX.
— Eh boy, tu vas marcher longtemps. T’es mieux de prendre l’autobus. Bon, moi faut que j’aille à l’épicerie, dis-je en tournant à droite.
… Et il tourne à droite avec moi, en disant, « Moi aussi! »
Non mais c’est pas vrai.
Non, c’est pas vrai que je vais perdre mon temps à m’inventer des besoins alimentaires avec un illustre inconnu. Alors en entrant dans le centre d’achats, je m’arrête devant le IGA et je m’apprête à lui annoncer officiellement que le temps est venu de me crisser patience.
Quand soudain, mon attention est attirée par un kiosque Unicef dont je n’aurais absolument rien à foutre en temps normal. La petite vendeuse me salue. Je me sens subitement trrrrrrèsssss intéressée par ses autos téléguidées, ses chargeurs iPhone à 20% de rabais et ses chandeliers magiques qui permettent de faire un vœu. Je lui pose une foule de questions et je lui demande de me décrire en détail chacun de ces items. Pendant ce temps, mon nouvel ami s’impatiente (enfin). Il finit par me dire, en pointant l’épicerie devant nous :
— Hey, je vais aller me chercher un café pis je reviens.
Aussitôt qu’il a le dos tourné, j’en profite pour remercier ma gentille vendeuse, et je lui promets de revenir après avoir fait mes courses. Je repars dans le sens inverse, je traverse tout le centre d’achats et je me pousse par l’autre sortie.

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