dimanche 27 octobre 2013

Lettre à la compagnie Jell-O

Chère compagnie Jell-O, 

Quand j’étais petite, comme beaucoup d’autres enfants, j’adorais me faire du Jell-O. Malheureusement, à chaque fois, il se retrouvait toujours une espèce de petite croûte pas mangeable dans le fond de mon plat. Le goût était le même que le reste du plat, mais la texture était abominable. Si raboteuse et irrégulière qu’en comparaison, les Gummy Bear ressemblaient à une légère et fondante mousse fruitée (sans offense pour les Gummy Bear, que j’adore, en passant). 

J’ai tout essayé pour éviter la formation de cette croûte : fouetter frénétiquement mon mélange avant de le réfrigérer, changer de sorte de plat, changer le format des plats… Rien n’y faisait. Je me voyais toujours dans l’obligation, non sans une larme au coin de l’oeil, de jeter une partie de mon dessert tant apprécié. 

J’ai longtemps nagé en plein déni. C’était moi, dans le fond, qui avait un problème. J’étais incapable de m’adapter à la différence. Je faisais du racisme de la texture. Je devais faire un effort, prendre des bouchées alliant à la fois la fluidité de la surface de la gelée, et le côté plus corsé, avec du caractère, du fond du plat, créant ainsi une expérience gustative hors du commun et toute en nuances. Rien à faire. 

J’ai fini par accepter l’indéniable réalité : j’aimais pas ça. Ça me coupait l’appétit ben raide. Comme le cartilage dans un morceau de poulet. Comme les morceaux de gras qui font crounch sous la dent dans un bon steak. Et c’est ainsi que j’ai continué, pendant des années, de jeter des litres de Jell-O aux poubelles. Pire encore : la fameuse croûte se retrouvait aussi dans les plats concoctés par les parents de mes amis. Dans les restos. Dans les cafétérias publiques. Et ainsi de suite. 

Devenue adulte, après une année d’études en pâtisserie, j’ai eu un déclic. Une illumination. Un éclair de génie. Je croyais avoir enfin compris comment faire un Jell-O pas d’croûte. Mais pour m’en assurer, il fallait l’essayer. C’est remplie d’espoir que je me précipitai à l’épicerie pour me procurer un exemplaire de ma saveur préférée – au raisin – et réaliser le test ultime. 

Ça a fonctionné. 

Mais cette découverte souleva un autre enjeu, beaucoup plus profond celui-là, et c’est la raison pour laquelle je vous écris aujourd’hui. C’est que, voyez-vous, l’un des principes de base de la gélatine est le suivant : pour pouvoir l’utiliser, il faut d’abord l’hydrater dans l’eau froide, remuer, puis laisser gonfler quelques minutes. Ensuite, pour la faire fondre, il faut la mettre en contact avec une source de chaleur. C’est ce que j’ai fait lors de mon expérience avec le Jell-O au raisin. 

Or, sur vos boîtes de poudre pour gelée, les instructions sont les suivantes : « Ajouter une tasse (250 mL) d’eau bouillante à la poudre pour gelée. » 

Une tasse d’eau bouillante. 

UNE.TASSE.D’EAU.BOUILLANTE. 

Pourquoi pas : « Méthode pour faire des croûtes », un coup parti? La suite de vos instructions va comme suit : « Ajouter une tasse (250 mL) d’eau froide ou de jus de fruit. » Pourtant, vous devriez le savoir, verser de l’eau chaude sur de la gélatine sèche et n’ayant pas été préalablement hydratée risque à coup sûr de créer des mottons. Ou une croûte. Vous voyez où je veux en venir, n’est-ce pas? DEPUIS LA NUIT DES TEMPS, VOUS INDIQUEZ LES ÉTAPES DANS LE MAUVAIS ORDRE. 

Vous l’aurez peut-être deviné, lors de mon test, j’ai fait exactement l’inverse. L’eau froide en premier, repos quelques minutes, l’eau bouillante ensuite. J’ai obtenu le Jell-O le plus délectable de toute mon existence. Le tout, sans aucun motton. Pas tellement surprenant, considérant que j’ai utilisé la seule et unique méthode valide pour traiter de la gélatine. Le contraire est une aberration. Induire en erreur des dizaines de milliers de personnes l’est encore plus. 

À la lumière de cette découverte, j’ai essayé de vous trouver des excuses. Peut-être cherchiez-vous à promouvoir le gaspillage, ce qui pousserait vos clients à racheter plus souvent de vos produits? Pas fou comme stratégie, mais peut-être à double tranchant : dégoûtés par la petite croûte, les clients pourraient tout simplement décider de ne plus jamais faire affaire avec vous. Pour aller plus vite? Même bémol que ma dernière hypothèse. 

Bref, je m’avoue vaincue. Je ne comprends pas. Voilà pourquoi je vous écris aujourd’hui. Pour vous demander pourquoi. Pourquoi dites-vous à vos clients d’ajouter l’eau chaude avant l’eau froide? Pourquoi ne respectez-vous pas la nature profonde de la gélatine? Pourquoi continuez-vous, depuis plusieurs décennies, à indiquer à la population au complet une information erronée? 

Bien à vous, 

D.C.

vendredi 25 octobre 2013

Un petit mot

6h AM, il fait nuit noire, je marche dans les rues de mon quartier passablement sécuritaire pour me rendre au métro, pour me rendre au travail. Soudainement se matérialise devant moi un barbu en t-shirt (je précise qu'il fait frette) qui m'apostrophe:
-Heille, t'as-tu l'heure?
D'oussé qu'il sort, j'en ai aucune idée.
Toujours est-il que mon premier réflexe est de reculer d'un mètre. Mon deuxième est d'éviter de prendre mon cell pour lui fournir une réponse exacte. Je continue de m'éloigner en inventant une heure approximative:
-Yé six heures et quart.
C'est alors que mon ami commence à tenter de me piquer une jasette, en pointant la vitrine d'un commerce miteux qui se trouve devant nous:
-Ah ok, j'essayais de voir là-dedans mais on voit rien, blablabla

J'ai raté la fin de sa phrase, parce que j'étais déjà loin. J'ai quand même eu un tout petit peu peur.

dimanche 12 mai 2013

Comment je me suis scrapé le pied

En 2008, j'ai acheté une belle paire de bottes chez Sears. 100$, vraiment belles, mais qui n'avaient visiblement pas été étudiées pour soutenir un pied humain. Vers la fin de l'hiver, j'ai commencé à avoir vraiment mal au gros orteil du pied droit, chaque pas était une souffrance. J'ai vu un médecin qui m'a prescrit des anti-inflammatoires, un acupuncteur qui m'a planté des aiguilles, et j'ai arrêté de porter les bottes, que je soupçonnais être la cause de ce malheur. La douleur est partie. Vive la jeunesse.
L'année d'après, quand la neige est revenue, j'ai recommencé à porter les bottes. Le jour même, la douleur est revenue. Mais vu que je suis conne, je me suis dit: "Ah mais là, je vais quand même pas déjà m'acheter des nouvelles bottes, celles-ci sont presque neuves, je vais au moins les porter une autre année,  je vais m'acheter des petites orthèses en gel chez Jean Coutu, ça va bien aller!!!!1"
Les bottes prenaient l'eau, elles étaient déjà scrap, j'avais mal au pied et j'ai jamais acheté lesdites orthèses cheap finalement.
Un beau jour, ma mère a entrevu mes bottes toutes scrap et je vous épargne sa réaction, mais toujours est-il que, malgré mes protestations, nous nous sommes retrouvées chez Sports Experts à la recherche d'une paire de bottes digne de ce nom. Je me suis ramassée avec des grosses bottes pas très esthétiques, de style Sorel, mais une autre marque, aucune chance que je me scrappe les pieds avec ça. Mais le mal était fait. Après une couple de mois, peu importe ce que j'enfilais, j'avais mal au gros orteil du pied droit. Horriblement mal.
Alors je suis retournée voir le médecin, qui m'a redonné une prescription d'anti-inflammatoires, et une référence pour aller voir un podiatre.
Cette fois-ci, les anti-inflammatoires n'ont pas réglé mon problème.
Ce que j'avais, c'était une sésamoïdite/métatarsalgie. Un problème courant et difficile (impossible) à régler.
Les orthèses ont contribué à limiter les dégâts, mais pas à régler le problème. Pis là, mes orthèses, je les ai perdues. Alors le problème a continué à se répandre dans le reste de mon pied. Le petit orteil d'à côté. La plante du pied. Ça brûle. Des élancements de brûlures.

PIS C'EST ÇA. Y'a pas de punch.

mercredi 10 avril 2013

Au magasin des chiens et des che

CECI EST UNE HISTOIRE VRAIE!!!!!!!!!!!

Le magasin des chiens et des che était un grand magasin à rayons. En y entrant pour la première fois, je sus immédiatement que le choix serait difficile. Sur les étalages se tenaient des dizaines et des dizaines de chiens et de che de toutes les grosseurs et de toutes les couleurs. Petits, moyens, gros, blanc, noirs, gris, bleus, verts. Je me dirigeai vers la section des che. Après avoir erré un certain moment en observant tous les modèles disponibles, un vendeur se dirigea vers moi.
–Avez-vous besoin d’aide, mademoiselle?
–Oui, je cherche un petit che.
Le jeune homme me répondit :
-Ah, parfait, ici, nous sommes dans la rangée des moyens che. Suivez-moi, les petits sont par là.
Nous nous dirigeâmes donc vers la rangée des petits che. Ceux-ci avaient l’avantage d’être flambant neufs. Les moyens et les gros comportaient certains modèles usagés, et je ne voulais pas prendre le risque de me retrouver avec un bris qui ne serait pas couvert par la garantie.
Les plus dispendieux étaient en or et me fixaient tendrement. Malheureusement, je n’avais pas les moyens de m’offrir un tel luxe. Le vendeur me demanda le prix que j’étais prête à payer pour mon nouveau petit che, et je lui expliquai que je voulais un modèle robuste, de bonne qualité, mais que ceux d’or et d’argent étaient trop chers pour mon budget. Il me suggéra alors trois modèles intéressants. Le Très très sale était blanc et gris. Le Petite chatte blanche était tout blanc. Le Petit tapuscrit était tigré avec un air coquin.
–Pourquoi celui-ci est en spécial? Demandai-je en désignant le Très très sale, affublé d’une étiquette rouge.
–C’est le dernier exemplaire, m’expliqua le commis en ajoutant qu’il avait été revu et amélioré, et que la manufacture leur enverrait une pleine cargaison du nouveau Très très sale+ d’ici la fin de la semaine. Comme le Petite chatte blanche me semblait un peu fragile, et que le modèle Petit tapuscrit m’avait l’air un brin tannant, j’optai pour le Très très sale. Après tout, celui-ci était en spécial. Je le pris et le déposai dans mon panier.
–Avez-vous besoin d’autre chose?
 –Non merci, ce sera tout.
Lorsque je déposai le petit che sur la caisse, celui-ci se mit à marcher. Avant qu’il ne se rende trop loin, je le pris et le redéposai au centre du comptoir. La caissière scanna le côté du che –BIP- et m’indiqua le montant total. Je payai, puis elle agrafa la facture à son oreille. Le petit che protesta légèrement : -Miou!
–Voulez-vous un sac? Me demanda la caissière.
–Oui s’il vous plaît, ce sera plus facile pour le transport.
Elle déposa le petit che dans un sac, qu’elle me remit en me spécifiant que les papiers relatifs à la garantie se trouvaient à l’intérieur. Je la remerciai et quittai le magasin, contente de mon achat.
En arrivant à la maison, je dégrafai la facture de son oreille, et celle-ci se déchira légèrement. –Miou, protesta le petit che. C’est alors que l’idée de son prénom me vint tout naturellement et je décidai de le baptiser : « Mais qu’est-ce qui est arrivé à l’oreille de ce che? » Malheureusement, la garantie ne couvrait pas ce type de dommages : elle ne couvrait que les défauts de fabrication, et en endommageant moi-même les petites oreilles en papier de mon nouveau che, je venais d’annuler la garantie.